C'était sur le bord de la Loire
La neige tombait par flocons
Partout l'aile de la victoire
S'acharnait sur nos bataillons
Quand au détour d'un petit village
Près de là l'on s'arrêta
Ah dit un gars au fin visage
Je reconnais ce moulin là
On l'appelait le moulin rose
Autrefois quand j'étais enfant
Jamais sa porte n'était close
La meunière s'appelait Rose
Elle m'endormait en chantant
Sous les ailes du moulin rose
C'était dans le temps des cerises
J'y reviens le coeur amoureux
Partout le mois de juin aux douces brises
Faisait flamber nos jolis yeux
Jeanne me regardait peut-être
Trop longtemps ce matin là
Car en passant sous sa fenêtre
Ma lèvre aux siennes s'effleura
Elle m'embaumait comme une rose
Mon coeur battait à se briser
Et Dieu me la reprit sans cause
Lorsqu'elle était à peine éclose
Un mois après ce doux baiser
Pris sous les ailes du moulin rose
Pendant qu'il rêve la mitraille
Siffle de nouveau par les champs
De nouveau la sombre bataille
S'acharnait sur nos régiments
C'est en vain qu'un ami se penche
Il roule le front tout sanglant
Sans un mot dans la neige blanche
Ah laisse moi dit-il doucement
Rien n'arrive jamais sans cause
Adieu je vais aller dormir
Près de Jeanne à la lèvre rose
Je veux ici que ma lèvre repose
Ah laisse moi finir de mourir
Sous les ailes du moulin rose
On m'a montré de la Touraine
Ce vieux moulin s'effondre
Où se dresse encore dans la plaine
Où le soldat fut enterré
Le lierre en tapisse la porte
Et les liserons au printemps
Viennent belliqueuses cohortes
Prendre d'assaut ses murs tremblants
Sous la tombe ou le gars repose
Les hirondelles m'a t'on dit
A chaque printemps viennent éclore
En revenant du pays rose
Viennent dresser leur premier nid
Sous les ailes du moulin rose
Fin